De la théorie de l’Information à la réalité des terrains

Le propos n’est pas ici de parler de sciences (ce que je serais incapable de faire) mais bien de dresser un parallèle avec notre quotidien d’entraineur. Car en résumé, qu’est-ce qu’un entraineur de football ? Les réponses sont diverses, nombreuses, mais une définition sensée et laconique peut se résumer à postuler qu’il s’agit d’un individu devant organiser son action de manière à transmettre de l’information faisant sens dans un contexte donné. Auquel cas, établir un parallèle entre la mission du coach et les préceptes édictés par le mathématicien américain n’est sans doute pas si abracadabrantesque que ça. Dans cette optique, on peut dévoyer le schéma originel de la façon suivante :

* Il convient de prendre le terme « Séance » dans son sens large, c’est à dire le canal permettant de passer l’information. Le terme peut donc tout aussi bien être remplacé par celui de méthode, procédé ou de méthodologie. Ou celui qui vous parait le plus approprié…

** De la même manière les mots « parasites » et « interférences » doivent être considérés comme étant l’ensemble de tout ce qui est capable de nuire à la compréhension et l’intégration du message (ex : joueur bloqué sur sa propre représentation du jeu, parents mettant en avant d’autres priorités que celles proposées par le coach etc, etc…. mais également, au premier rang, les propres insuffisances et approximations de l’entraineur)

Or, dans le cadre du numérique comme dans celui du football, la grande difficulté consiste à faire passer l’information (le projet de jeu par exemple dans le contexte du football ou un fichier lorsque vous êtes sur votre boite mail) par le biais du canal disponible (la séance pour le coach, un satellite ou un câble sous marin transatlantique pour l’ingénieur en informatique). La difficulté, énonce Shannon, est que tout canal à des limites physiques d’une part et que les « bruits » environnants (les interférences- les parasites) sont susceptibles de brouiller complètement le message d’autre part. En la matière, tous les entraineurs savent bien qu’il y a parfois des différences conséquentes entre la teneur du discours que l’on souhaite exprimer et la manière dont les joueurs le perçoivent.

La question se pose donc de savoir comment faire passer le message. Une première approche peut consister à répéter le message sous la même forme encore et encore : « Auquel cas, précise un scientifique dans le documentaire, en captant des bribes ânonnées en permanence de celui-ci, le message va peut être finir par passer et devenir intelligible pour le récepteur ». Force est d’avouer que le « peut-être » n’est pas très réjouissant. Tout comme la perspective de répéter sans cesse et de la même manière les mêmes consignes aux mêmes joueurs avec un risque accru de lassitude, et donc d’inefficacité, de la part de toutes les parties en présence.

La deuxième option consiste à crier + fort. J’ignore parfaitement quelle forme cela peut prendre en informatique, mais si l’on projette le fait sur le football, cela signifie énoncer les choses avec + de force, de conviction. Le plus souvent en imposant notre propre point de vue sans faire appel à l’intelligence conceptuelle du joueur. Ce qui peut marcher. Mais pas longtemps ! Tout simplement parce que l’inattendu survient toujours et qu’un esprit conditionné est bien souvent moins capable qu’un autre de trouver une solution adaptée à un problème changeant.

En fait, une piste de réflexion est proposée par un des intervenants spécialiste de la dite théorie de l’information sur laquelle repose toute notre société de communication : « Pour faire passer le message, il y a la nécessité implicite de bien choisir ses mots,  de dire les choses plusieurs fois mais différemment et en les présentant autrement. Mais il faut également bien coder et, dans le courant de communication, apporter un code de correction. Quelque chose comme : je vous dis ça pour formaliser telle idée et parce celle-ci va nous permettre d’atteindre les objectifs que vous souhaitez atteindre»

En d’autres termes pour un entraineur : « avoir les idées claires quant à la teneur du message (comportements attendus), diversifier, proposer des contenus différents susceptibles de solliciter toutes les formes d’intelligence dans le groupe, établir un langage collectif commun et faciliter les initiatives et les échanges en établissant un climat affectif valorisant. »

Mais ça, n’est-ce pas ce n’est pas vraiment une théorie, juste l’expression d’une réalité arguant que tout message exprimé ne vaut qu’à partir du moment où il est entendu, intégré car décodé, et qu’à ce titre il nécessite l’appoint d’une réflexion pédagogique étayant notre compétence technique.

Olivier GOUTARD

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